Cinéma CGR – Yann Marie
« Le cinéma doit se réinventer »
Avec ses 10 salles et ses 1 600 fauteuils, le CGR Rodez fête cette année ses 10 ans. Son directeur, Yann Marie, revient sur la crise qui a ébranlé l’économie du 7e art et sur le retour (ou pas) du public.
« Pour moi, la véritable reprise du cinéma, c’était Avatar : 17 000 entrées en deux semaines, on n’avait jamais vu ça », souligne Yann Marie. Un « aspirateur à spectateurs » qui a renoué le lien affectif entre le public et les salles obscures – après un premier gros succès, Top Gun, resté à l’affiche de mai 2022 à l’automne,attirant 10 000 entrées. Mais le cinéma est encore convalescent. La crise sanitaire a été un tel choc, que le directeur du CGR Rodez en parle avec émotion. « Les cinémas sont ouverts 365 jours par an de 9h à 1h ; dans l’histoire du cinéma, ils n’ont jamais fermé. Même pendant l’Occupation ! » Pendant ces mois de fermeture, l’équipe a pris son mal en patience et s’est réapproprié les lieux, vérifiant chaque fauteuil, projetant des bandes-tests… La réouverture sous condition de pass sanitaire n’a pas été de toute sérénité. Yann Marie se souvient de ce moment. « On devait sortir Kaamelott, le mardi, on a fait plus de 1000 entrées pour l’avant-première, alors que le lendemain, avec l’entrée en vigueur du pass, on a accueilli 200 personnes !»
Aujourd’hui, tous les publics ne sont pas revenus au cinéma. Une partie des gens s’est mise au streaming et au grand écran à la maison. « Il faut se réinventer, assure Yann Marie. Cela peut passer par l’expérience réalité virtuelle, une diversification (concerts, théâtre, retransmissions…), par les salles premium, dotées de son Dolby Atmos, des écrans sur les côtés, des fauteuils plus confortables… Ces salles prennent de plus en plus de parts de marché. » Bientôt à Rodez ? « Pas opportun pour l’instant », confie le directeur du CGR.
Anticipant encore quelques mois difficiles, Yann Marie parie sur quelques films attendus ce printemps comme Super Mario Bros et Les Trois Mousquetaires. La vente du groupe CGR Cinémas, en cours depuis un an, n’est pas non plus propice aux révolutions. Loin des tractations, l’équipe ruthénoise poursuit son cinéma « dans la diversité » et continue à se faire plaisir avec une programmation très libre des Plans Cultes, les 1er et 3e mardis du mois, animés par le cinéphile Igor Sakiroff. Ou le bonheur coupable de revoir des Kubrik, des Clint Eastwood et autres chefs d’œuvre du 7e art.
Texte : Agnès d’Armagnac – Photo : Franck Tourneret