Guillaume Viala & Florian Boubal Réunis autour du bon sens paysan
ATOUT DOSSIER
CHEFS ÉTOILÉS ET PRODUCTEURS
Les alliances gagnantes de la gastronomie
Depuis bientôt vingt ans, Guillaume et Christine Viala sont à la tête de l’hôtel- restaurant Le Belvédère, suspendant une étoile Michelin au-dessus du trou de Bozouls. Avec dans leur ADN, un attachement immuable aux produits, producteurs et productrices du pays. Parmi eux, Florian Boubal dont le GAEC familial approvisionne la région en volailles fermières diverses, agneaux et farines, ainsi qu’en pâtesartisanales élaborées à la ferme de A à Z.
Comment vous êtes-vous rencontrés ?
Guillaume Viala : Il y a une douzaine d’années, Florian a déboulé avec ses poulardes. C’était super : depuis, on lui passe plusieurs commandes par semaine. Des volailles, des pâtes pour l’équipe, de la farine… Quand on l’a goûtée, on ne peut plus consommer autre chose. Il produit un blé de population, authentique, nourricier, bon pour la santé, et qui redonne ses lettres de noblesse au Causse Comtal.
Florian Boubal : Ce qui est extraordinaire pour nous, c’est que Guillaume accepte le produit tel qu’il est. Selon les années et la taille des blés, la farine va être différente ; selon la période, il vaut mieux privilégier certaines volailles. S’il fait trop chaud par exemple, les poulardes ne font pas de gras. Alors je lui téléphone, et il change son menu. Il s’adapte à la nature. Et prend les volailles entières, pas seulement les cuisses et filets.
C’est donc un véritable partenariat…
GV : Il faut écouter le savoir-faire des agriculteurs. La cuisine s’improvise selon ce qui arrive, et se base sur la connaissance profonde des produits (variétés, souches, climat…). Ça passe par le travail avec les gars du coin. Maintenant, tout le monde parle de circuit court, de local. Mais c’est une évidence ! Un légume de saison, c’est un pléonasme. La ferme de ma grand-mère m’a marqué au fer rouge : les volailles et les cochons, aller chercher le lait et les œufs. Ma cuisine milite pour la défense de cette polyculture ancestrale, lutte contre la transformation des paysans en industriels. Alors je préfère le mot « bon sens paysan » : une agriculture logique, de métier, loin de l’uniformisation et de la mondialisation. C’est ce que je retrouve chez Florian. Sans être un paysan poète, il fait du bon, du sain, du concret.
Que signifie être servi au Belvédère ?
FB : Cela nous permet de travailler avec des personnes authentiques, dans une relation de confiance. Avec Guillaume, nous sommes un peu utopiques tous les deux. Et puis, c’est très important de savoir où vont nos produits. Les amener aux chefs m’a paru essentiel, tant pour avoir des retours sur la qualité que pour découvrir comment ils pouvaient être valorisés. J’ai le souvenir incroyable d’une cuisson de colvert au Belvédère : c’était absolument parfait, je n’aurais jamais pu faire quelque chose d’aussi technique ! Et c’est un lien avec la cuisine : j’aurais voulu être cuisinier.
GV : Et moi, paysan ! (rires)
Propos recueillis par Charlotte Izzo – Photo : Fred Garrigues